Auteure : Alessandra Facchin

Introduction

L’objectif de ce travail est de comparer, dans une visée exploratoire, deux instruments de mesure de l’apprentissage autorégulé : le Self-Regulated Learning Interview Schedule (SRLIS) et le Motivated Strategies for Learning Questionnaire (MSLQ). Avant de nous plonger dans cette comparaison, il est essentiel de définir l’apprentissage autorégulé.

Le concept d’apprentissage autorégulé souligne le caractère dynamique et itératif de l’autorégulation dans un contexte scolaire. Greene (2018, cité dans Berger et Cartier, 2023) le définit comme « la poursuite active et réfléchie des objectifs d’apprentissage souhaités par la planification, la mise en œuvre, le monitorage, le contrôle et la réflexion sur les facteurs internes (cognition, métacognition, motivation, comportement, affect) et externes (environnement) avant, pendant et après l’apprentissage » (p. 138). Dans ce cadre, Pintrich (2004) propose une modélisation de l’apprentissage autorégulé en quatre phases. La première étant celle d’anticipation, de planification et d’activation. Dans cette phase, les croyances motivationnelles, comme la valeur accordée à la tâche, influencent directement la motivation à s’engager. La troisième phase de monitorage métacognitif et cognitif est suivie par une phase dédiée au contrôle de la tâche, qui inclut la gestion du temps, la régulation de la motivation et de l’effort, ainsi que l’ajustement des stratégies métacognitives. Enfin, une dernière phase consiste en une réflexion sur les choix accomplis et l’évaluation de l’activité, accompagnée par une réaction émotionnelle. 

La métacognition, définie comme la capacité à réfléchir sur ses propres pensées (connaissances métacognitives) et à utiliser des stratégies d’ordre supérieur pour mieux gérer ses apprentissages (Hacker, 1998 ; Schraw et al., 2000), joue un rôle central dans ce processus (Veenman et al., 2005). Développer ces compétences permet aux apprenant·e·s d’anticiper, planifier et ajuster leurs apprentissages de manière autonome (Berger et Büchel, 2012), augmentant ainsi leur réussite académique (Schunk et Greene, 2018) et contribuant à l’apprentissage tout au long de la vie (Boekaerts, 1997). 

Dans cette optique, la compréhension des stratégies d’apprentissage autorégulé et leur évaluation à travers les outils SRLIS et MSLQ pourrait contribuer à améliorer les performances des apprenat·e·s, tout en optimisant leurs parcours d’apprentissage.

1. Le Self-Regulated Learning Interview Schedule (SRLIS)

1.1  Description de l’outil

Le Self-Regulated Learning Interview Schedule (SRLIS) est un des premiers instruments conçus pour identifier et mesurer les stratégies d’apprentissage autorégulé des élèves. Le but étant celui de comprendre le rôle de ces stratégies dans la réussite scolaire des élèves, en vue de concevoir des interventions pouvant conduire les élèves à développer une majeure autonomie et conscience dans leurs apprentissages (Zimmerman et Pons, 1986). Les chercheurs ont identifié 14 catégories de stratégies ou comportements autorégulés (cf. tableau 1.). Il est important de préciser que, dans cette étude, les chercheurs conçoivent l’autorégulation des apprentissages non pas comme un processus, mais plutôt comme un ensemble de compétences ou aptitudes que l’élève est encouragé à développer et intégrer progressivement pour réussir. 

Le SRLIS se présente sous-forme d’entretien bref structuré, composé par six scénarios renvoyant à des situations académiques conventionnelles (cf. Annexe I). Dans une première partie, le·la chercheur·euse interroge le·la participant·e par rapport aux comportements employés au sein de chaque scénario. Dans un deuxième temps, pour chaque stratégie mentionnée par l’élève, le chercheur ou la chercheuse demande d’évaluer sa régularité d’utilisation sur une échelle à 4 points : 1= rarement; 2 = occasionnellement; 3 = fréquemment; 4 = la plupart du temps. Les réponses des participant·e·s sont ensuite analysées et converties en scores à l’aide d’une échelle dichotomique et d’une échelle de fréquence. L’échelle dichotomique indique l’utilisation de stratégies par le·la participant·e à l’aide d’une échelle allant de 0 = aucune apparition de la stratégie à 1 = la stratégie est apparue dans l’un des six scénarios. Alors que la deuxième, permet d’établir le nombre d’occurrences d’une certaine stratégie au travers des six scénarios.

1.2 Description de l’échantillon

Deux étudiants universitaires italophones de 23 ans ont été sélectionnés pour participer à la passation du SRLIS. Le premier participant est un étudiant en troisième année de Bachelor en psychologie (180 ECTS) ayant débuté le Master anticipé en psychologie clinique. Alors que le second, il est en troisième année de Bachelor en Sport (120 ECTS) et pédagogie/psychologie (60 ECTS).

1.3 Description de la méthodologie

Dans un premier temps, un guide d’entretien a été élaboré (cf. Annexe I.) pour suivre de manière rigoureuse la structure du SRLIS et éviter des relances spontanées. La première passation s’est déroulée le matin à 10h30, dans un environnement calme et sans distractions, afin de favoriser la concentration du participant. Cet entretien a duré environ 25 minutes. Le deuxième entretien a eu lieu à 14h00 à l’université, dans une salle privée, et a pris environ 20 minutes. Dans les deux cas, après avoir obtenu l’accord des participants, j’ai enregistré les entretiens à l’aide d’un dictaphone et une fois les entretiens réalisés, un verbatim intégral a été réalisé à l’aide de Turboscribe. 

Les participants se sont démontrés être à l’aise. Cependant, le premier étudiant a été plus concentré et motivé par rapport au deuxième ; il est possible que l’heure et le lieu de la passation aient influencé cet aspect motivationnel.

1.4  Présentation des résultats 

1.4.1 Interprétation des résultats issus du premier entretien

Les résultats présentés (cf. tableau 5.) ont montré que l’étudiant met en place les stratégies d’organisation et transformation des informations de manière régulière, avec une fréquence moyenne de 3.44 (Fm = 3.44). Aussi, il utilise plus que fréquemment (Fm = 3.43) la stratégie de fixation des objectifs et de planification. L’étudiant démontre également accorder une grande importance à la répétition et à la mémorisation pour renforcer ses apprentissages (Fm = 3.75).

Les analyses montrent que l’étudiant favorise une approche structurée et répétitive, intégrant des méthodes telles que la prise de notes, les synthèses en couleur et le questionnement comme techniques de révision, sans s’attarder sur l’aménagement de son environnement d’étude ni sur les conséquences personnelles de ses actions (Fm = 0). Il semble privilégier des stratégies qui lui permettent de renforcer sa confiance et de maintenir sa motivation. Par exemple, dans le cadre de ses devoirs, il préfère commencer par des tâches plus simples pour se motiver (cf. tableau 2). En outre, il est aussi notable qu’il recherche fréquemment l’aide de ses pairs, dans des situations spécifiques. Cette approche de soutien social est un moyen qui lui permet de mieux gérer ses difficultés d’apprentissage et d’approfondir ses connaissances (« Je demande à mes camarades ou à des amis pour avoir une explication peut être différente de celle que je vois en classe ou avec le professeur », ou encore « Comme ça je peux aussi me confronter avec d’autres camarades ». 

L’étudiant se montre conscient des stratégies d’apprentissage qu’il met en place pour contrer ses difficultés. En particulier, les stratégies d’organisation et de planification lui permettent fréquemment (Fm = 3) de surmonter les obstacles motivationnels : « Oui, alors… J’ai de la peine, des fois, à terminer mes devoirs et j’ai tendance à procrastiner. Mais pour me motiver, c’est une chose… Je vais faire une liste de choses à faire ». 

1.4.2 Interprétation des résultats issus du deuxième entretien

Le deuxième participant (P2) semble accorder une grande importance à la structuration de ses apprentissages (cf. tableau 6). Il déclare (9 fois) recourir à des stratégies d’organisation et de transformation la plupart du temps. La fixation d’objectifs et la planification ont été mentionnées cinq fois (Fm = 4), ce qui montre qu’il est proactif et organisé dans la gestion de ses objectifs. Les deux mentions des stratégies de structuration de l’environnement (Fm = 4) suggèrent qu’il s’efforce toujours de créer un environnement favorable à ses études. Quant à la répétition et à la mémorisation, P2 mentionne cette stratégie cinq fois (Fm = 3.8), ce qui indique qu’il se dédie régulièrement à ces pratiques pour renforcer ses connaissances.

Ce participant démontre posséder une planification structurée et répétitive pour atteindre ses objectifs d’étude de manière autonome, tout en recourant à l’aide externe (Fm = 3.5) des pairs ou des enseignant·e·s lorsque nécessaire. Il explique : « Si je ne comprends pas quelque chose de la matière, je pense que je vais utiliser notre ami ChatGPT. Mais seulement si je ne comprends pas… Ou éventuellement demander à mes camarades », ou encore : « Lorsque je rencontre des difficultés, je vais demander à quelqu’un, un camarade qui a plus de confiance avec la matière, pour trouver des conseils, du soutien… Et s’il n’y a pas de camarades qui peuvent m’aider, alors je demande aux enseignant·e·s »

Nous pouvons également remarquer que cet étudiant planifie ses apprentissages de manière régulière (Fm = 4), ce qui lui permet de mieux s’organiser et de réduire le stress perçu. Comme il le mentionne : « Et ça, je vais le faire avec beaucoup d’avance, autrement je ressens trop de stress, je crains de ne pas réussir ». Il semble également être motivé par les conséquences personnelles et la peur de l’échec (Fm = 4), affirmant : « Le stress et l’anxiété me motivent à travailler ; je m’enferme dans ma chambre et je travaille ». Cette déclaration montre qu’il est conscient des facteurs environnementaux qui peuvent favoriser ses apprentissages.

1.5 Discussion SRLIS

Le croisement des analyses avec ma collègue a fait émerger plusieurs limites de cet outil, tout en confirmant son utilité pour évaluer les stratégies d’apprentissage autorégulé (Zimmerman & Martinez-Pons, 1988). Il faut cependant souligner que le SRLIS a été administré à un échantillon de taille réduite, ce qui limite la possibilité d’effectuer des comparaisons généralisables à la population.

Une révision de certains scénarios (cf. scénario 5) apparaît indispensable afin répondre aux exigences des niveaux académiques supérieurs. De même, l’intégration des technologies, comme l’intelligence artificielle, dans la conception des scénarios, conformément aux recommandations de Heikkinen et ses collègues (2023), pourrait renforcer la pertinence des évaluations au sein des contextes éducatifs actuels.

En ce qui concerne la validité de construit, l’inventaire permet d’identifier efficacement les stratégies et processus d’autorégulation, mais il ne permet pas de capturer l’ensemble des stratégies adoptées par les étudiant·e·s et leurs variations au fil du temps. En plus, la validité de contenu semble dépendre fortement de la motivation des participant·e·s, ainsi que de leur capacité à fournir des réponses détaillées et fluides. Toutefois, des réponses complètes ne sont pas toujours fournies, même après des relances. Cette limite est contournée par Zimmerman et Martinez-Pons (1988), qui affirment que ce test mesure spécifiquement les stratégies d’apprentissage autorégulés des apprenant, et non leur fluidité verbale.

Sur le plan de la fiabilité, la structure linéaire du SRLIS favorise la reproductibilité des résultats, mais certains biais peuvent affecter la fidélité test-retest (Zimmerman & Martinez-Pons, 1988). À savoir, un biais de désirabilité sociale peut survenir, lorsque les étudiant·e·s modifient leurs réponses en fonction de ce qu’ils·elles perçoivent comme acceptable ou attendu. Une difficulté majeure réside également dans l’identification et l’interprétation univoque des stratégies d’apprentissage par les chercheurs·euse·s, celles-ci pouvant simultanément appartenir à plusieurs catégories à la fois.

2. Motivates Strategie for Learning questionnaire (MSLQ)

2.1 Description de l’outil 

Le MSLQ est un questionnaire auto-rapporté qui mesure la motivation et les stratégies d’apprentissage des étudiant·e·s dans un cours spécifique à partir d’une échelle de Likert allant de 1 à 7 (Pintrich, 1991). Cet instrument comporte un total de 81 items et de divise en deux dimensions principales ; à savoir les stratégies d’apprentissage et les stratégies motivationnelles : 50 items pour les stratégies d’apprentissage, dont 31 items sur les stratégies métacognitives et 19 items sur la gestion des ressources. En revanche, les stratégies motivationnelles sont composées par 31 items, qui se divisent en composantes de valeur, composantes d’attente et composante affective.

2.2 Description de la méthodologie

Le MSLQ a été passé juste après le SRLIS, dans le même environnement calme et sans distractions, afin de favoriser la concentration des participants. Cet aspect de succession est à ternir en compte lors des analyses, car pourrait avoir créer un effet de fatigue auprès des étudiants. Pour les deux participants l’achèvement du questionnaire a pris environ 20 minutes. 

2.3 Présentation des résultats 

Avant de procéder dans l’analyse, il convient de préciser que celle-ci se basera sur le seuil posé par Pintrich (1991) dans son étude. Le chercheur considère les valeurs de 1 à 3 comme faibles, tandis que celles supérieures à 3 sont jugées comme bonnes : « a higher score such as a 4, 5, 6, or 7 is better than a lower score like a 1, 2, or 3 […]  » ou encore, « In general if your scores are above 3, then your are doing well. » (Pintrich, 1991, p. 51).

Berger et Büchel (2012) soulignent la nécessité d’une articulation entre les dimensions cognitives, métacognitives et la dimension motivationnelle et affective pour favoriser l’efficacité des apprentissages. Cette articulation se manifeste dans le MSLQ par une synergie entre les stratégies cognitives, métacognitives et les trois sous-échelles motivationnelles, qui se composent comme suit :

  1. La composante de valeur, regroupant les scores moyens liés à la valeur de la tâche et aux objectifs intrinsèques et extrinsèques.
  2. La composante d’attente, comprenant le contrôle des croyances sur l’apprentissage et l’auto-efficacité.
  3. La composante affective, composée par le score moyen d’anxiété.

Cette articulation est illustrée dans la Figure 1 en annexe, qui sera analysée en détail pour chacun des deux participants dans les sous-chapitres qui suivent.

2.3.1 Interprétation des résultats du premier sujet

En analysant les scores moyens issus du MSLQ, nous constatons que tous se situent au-dessus du seuil limite. Cependant, certains scores se révèlent inférieurs à la moyenne globale (M = 5.49), notamment ceux liés à l’apprentissage par les pairs (M = 4) et aux objectifs extrinsèques (M = 4). Ces résultats traduisent un manque relatif de motivation extrinsèque, en faveur d’une motivation intrinsèque élevée (M = 5.5).

Selon Berger et Büchel (2012), une motivation intrinsèque solide, soutenue par une forte valeur perçue des tâches (M = 6.67), favorise l’utilisation de processus métacognitifs, ici particulièrement élevés (M = 5.82). Les chercheurs soulignent également que les compétences métacognitives jouent un rôle protecteur contre l’anxiété, permettant aux apprenant·e·s de mieux gérer leur stress en ajustant leurs stratégies et en adoptant des pensées positives. Cela se reflète dans ce cas par une maîtrise de l’anxiété, avec un score moyen de 4.2.

Il est également intéressant de souligner, l’usage marqué de stratégies d’apprentissage comme la répétition (M = 6.5), l’organisation (M = 6.25) et l’élaboration, également moyennement élevée (M = 6.25). Ces résultats suggèrent que cet étudiant attribue une grande valeur à la tâche, ce qui le motive intrinsèquement (Berger et Büchel, 2012). Le score moyen pour la régulation de l’effort est très élévé (M = 6.75). Selon Pintrich (1991), cela reflète une facilité à gérer et ajuster son niveau d’engagement pour atteindre ses objectifs d’apprentissage face aux obstacles ou à une baisse de motivation. 

Le Tableau 6 en annexe révèle que P1 a obtenu un score moyen pour les « Stratégies d’apprentissage cognitives et métacognitives » (M = 5.82) qui est supérieur à celui des composantes motivationnelles, bien que ces dernières restent modérément élevées. Globalement, une synergie est présente pour la composante de valeur (M = 5.39) et pour la composante d’attente (M = 5.19), mais elle est moins marquée pour la composante affective (M = 4.2). Ces observations indiquent un certain équilibre entre la motivation de l’apprenant et les stratégies mises en œuvre. L’étudiant démontre un engagement important et une capacité à réussir grâce à l’utilisation de stratégies efficaces.

2.3.2 Interprétation des résultats du deuxième sujet

Le deuxième participant présente deux valeurs en dessous du seuil limite de trois : l’apprentissage par les pairs (M = 2.67) et la recherche d’aide par les pairs (M = 3). De nombreux items affichent également des scores légèrement inférieurs au seuil, notamment les stratégies d’élaboration (M = 3.5), d’organisation (M = 3.75) et de pensée critique (M = 3.6). En revanche, des scores élevées apparaissent dans la gestion des ressources, particulièrement dans la gestion du temps et de l’environnement d’étude (M = 6.12), ainsi que dans la régulation de l’effort (M = 6.25).

Pour ce qui est des stratégies motivationnelles, la motivation intrinsèque est relativement élevée (M = 5), tandis que la motivation extrinsèque est plus faible (M = 3.25). Comme pour le P1, la motivation intrinsèque du P2, soutenue par une forte valeur perçue des tâches (M = 5.5), devrait favoriser l’utilisation des processus métacognitifs. Toutefois, ces derniers restent modestes (M = 4). Dans cette perspective, la Figure 1 met en évidence une tentative de synergie entre les quatre dimensions. 

En accord avec Berger et Büchel (2012), un sentiment d’efficacité moyen (M = 4.25), combiné à l’anxiété cognitive (M = 4.8), peut interférer avec la régulation des processus cognitifs et limiter ainsi l’utilisation des stratégies métacognitives. 

2.4 Discussion MSLQ

L’instrument MSLQ a fait l’objet de nombreuses évaluations portant sur les indices de validité, de fiabilité et de pertinence. Il en résulte que cet outil est largement utilisé et considéré comme un outil robuste pour évaluer les dimensions motivationnelles et stratégiques de l’apprentissage dans divers contextes académiques (Duncan et McKeachie, 2005). Les chercheurs soulignent d’autres avantages majeurs, que j’ai également pu constater : il fournit un feedback précieux pour améliorer les attitudes motivationnelles et les stratégies d’apprentissage, tout en favorisant une prise de conscience des comportements d’apprentissage par les participant·e·s.

Parmi les limites principales identifiées lors de la discussion avec ma collègue, il apparaît que la longueur du questionnaire et la redondance de certains items peut induire à un effet de fatigue chez les participant·e·s. Ainsi, une réduction du nombre d’items pourrait être envisagée (Wang et al. 2022).

La pertinence de cet outil varie en fonction des contextes socio-culturels. Dans les pays d’Asie de l’Est, la motivation extrinsèque (soutenue par le prestige familial et les attentes sociétales) domine, tandis que dans les contextes occidentaux, la motivation intrinsèque est privilégiée (Jackson, 2018 ; Nausheen, 2016). Cette variabilité et l’indépendance de sous-échelles, reflète la flexibilité du MSLQ, qui permet aux chercheurs de sélectionner les dimensions adaptées à leurs besoins (Duncan et McKeachie, 2005), mais complexifie la standardisation des comparaisons.

En termes de validité, les résultats sont mitigés. La validité de construit montre un modèle factoriel raisonnable (Pintrich, 1991 ; Duncan et McKeachie, 2005). Toutefois, l’étude de De Araujo et ses collègues (2003) signale un modèle factoriel inadéquat. De plus, les chercheurs soutiennent que les modifications apportées aux échelles et aux items dans les différents contextes culturels, rendent compliquée une comparaison croisée.

La validité prédictive est soutenue par des corrélations significatives, bien que modérées, entre les deux échelles (motivation et stratégies d’apprentissages) et la performance académique des élèves (Pintrich, 1991). Cependant, De Araujo et ses collègues (2003) remettent en question ce lien, soulignant la nécessité de réviser la structure et la méthodologie d’évaluation du MSLQ.

En ce qui concerne la fiabilité, celle-ci demeure robuste, avec un alpha de Cronbach variant entre 0,52 et 0,93 (Pintrich, 1991) dans les contextes occidentaux, avec des résultats similaires observés dans d’autres contextes, notamment en Iran (Jakesova, 2014) et en République tchèque (Feiz, Hooman et Kooshki, 2013).

Cependant, il pourrait être pertinent d’envisager une fusion des items relatifs à « l’apprentissage par les pairs » et à la « recherche d’aide sociale », qui partagent des dimensions communes (Karabenick et Dembo, 2011). Cette intégration pourrait améliorer la valeur d’alpha minimale observée pour la dimension « recherche d’aide sociale » (α = 0,52).

En somme, bien que le MSLQ soit un outil robuste et flexible (Pintrich, 1991 ; Duncan et McKeachie, 2005), les limites évoquées, suggèrent une révision méthodologique pour mieux répondre aux normes psychométriques actuelles. En plus, afin d’améliorer ultérieurement la validité du test, il serait pertinent d’ajouter une question finale portant sur le cours spécifique choisi, ainsi qu’une auto-évaluation de la motivation relative à ce cours.

3. Comparaison SRLIS et MSLQ

Les deux outils présentent des similitudes. Tout d’abord il s’agit d’instruments adaptés à un niveau académique supérieur, bien que quelques ajustements soient nécessaires au niveau de la formulation des items pour en améliorer la pertinence. Aussi, les outils visent à mesurer et évaluer l’apprentissage autorégulé des élèves à travers des approches et des outils de mesure divergents. Dès lors, il n’est pas possible de comparer directement ces deux outils en raison de différences substantielles : l’un est un questionnaire d’autoévaluation, et l’autre est un entretien semi-directif composé de 6 scénarios distincts. De plus, les échelles de mesure diffèrent : le QRLS utilise des scores moyens, tandis que le SRLIS se base sur des fréquences ou occurrences. La Figure 2 illustre clairement que les stratégies se manifestent différemment selon les deux outils. Le premier participant par exemple, obtient des scores élevés en gestion du temps, mais il ne mentionne pas cette stratégie dans les scénarios du SRLIS. De même, bien qu’il obtienne un score élevé pour la structuration de l’environnement dans le MSLQ, il ne fait référence à cette stratégie dans le SRLIS.

Ces divergences ouvrent néanmoins la voie à une utilisation complémentaire de ces deux outils, afin d’enrichir et de compléter l’évaluation de l’apprentissage autorégulé.

Conclusion

Ce travail exploratoire met en évidence les multiples facettes de l’apprentissage autorégulé, ainsi que la complexité d’évaluer ce processus, qui est par nature difficile à appréhender. Bien que ces outils diffèrent, ils offrent des approches complémentaires pour mesurer efficacement les stratégies d’apprentissage autorégulé des étudiant·e·s. Cependant, une réflexion plus approfondie sur la manière de croiser ces deux outils est indispensable.En outre, une mise à jour régulière de ces tests est essentielle pour garantir leur pertinence dans divers contextes. Il est également crucial de prendre en compte les biais sous-jacents présents lors de la passation et de l’évaluation des résultats, car ceux-ci peuvent exercer une influence significative sur l’analyse et l’interprétation des données.

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