Introduction

Dans le contexte d’enseignement et d’apprentissage, la métacognition et l’autorégulation de l’apprentissage sont des notions fondamentales du processus d’apprentissage (Boekaerts, 1997) et essentielles à la réussite scolaire (Berger et al., 2013).  L’autorégulation est un des concepts clés dans le domaine de la recherche en éducation (Berger et Büchel, 2012). Relié au concept de métacognition introduit par (Flavell, 1979) puis défini plus tard par Mevarech et Kramarski (2014) comme la pensée sur la pensée sur sa propre pensée. Quant à l’apprentissage autorégulé, Zimmerman et Pons (1986) le définissent comme un processus dans lequel l’apprenant·e prend activement en charge son propre apprentissage en fixant des objectifs, en planifiant des stratégies pour les atteindre, en surveillant ses progrès et en ajustant ses actions selon le besoin. Ainsi, l’apprentissage autorégulé repose sur l’initiative personnelle avec une intention claire, consciente et une confiance en sa capacité à utiliser efficacement les ressources et les outils disponibles (Schunk et Greene, 2018). 

Le modèle d’Usher et Schunk (2017) décrit l’autorégulation comme un cycle en trois phases : la phase de planification (préparation), la phase de performance (mise en œuvre et monitoring) et la phase de réflexion. Ces trois phases s’enchaînent de manière itérative. Ce cycle permet donc de réguler les comportements et les stratégies en vue d’atteindre un objectif.

Malgré une littérature abondante sur l’autorégulation de l’apprentissage et la métacognition, l’évaluation de ces processus demeure complexe. En effet, les chercheurs et chercheuses s’emploient au développement de dispositifs permettant l’évaluation des stratégies d’autorégulation de l’apprentissage. Le SRLIS (Self-Regulating Learning Interview Schedule) en est un exemple. Cet outil est un entretien directif qui a été développé dans le but d’interroger des étudiant·e·s du niveau High School ayant entre 17 et 19 ans environ. Cet outil a été développé par Zimmerman et Pons en 1986. Dans ce travail, c’est cet outil qui va être utilisé ainsi que le MSR-T (Marburg Self-Regulation Questionnaire for Teachers) qui vont être administrés à deux étudiant·e·s de l’université de Fribourg. Le second outil, le MSR-T a été développé par Li Sanchez et Schwinger (2023) afin d’évaluer les enseignant·e·s.  La passation de ces deux outils permettra d’avoir un aperçu de leurs fonctionnements respectifs. De fait, il pourra ensuite être possible de comprendre comment les utiliser afin de fournir des perspectives complémentaires. Cependant, leur articulation et leur pertinence afin d’éclairer les enjeux de régulation des apprentissages restent à explorer.

Le SRLIS, conçu pour recueillir des données relatives à un public d’étudiant·e·s dans des contextes réels d’apprentissage, offre une vision sur la mobilisation des stratégies d’autorégulation des apprentissages chez les apprenant·e·s. En parallèle, le MSR-T qui est destiné aux enseignant·e·s permet d’évaluer leurs pratiques et perceptions de l’autorégulation de l’apprentissage en contexte professionnel. Ces deux perspectives, apprenant·e et enseignant·e soulèvent la question de leur complémentarité : dans quelle mesure les outils peuvent-ils être utilisés ensemble pour fournir une compréhension la plus détaillée de l’autorégulation de l’apprentissage chez un individu ?

Ce travail a pour objectif d’examiner la complémentarité du SRLIS et du MSR-T à travers leur application à deux sujets, et d’analyser les points connivents et divergeant de ces derniers au travers des résultats obtenus. La première partie présentera le SRLIS, l’échantillon, la méthodologie employée, les résultats obtenus et une discussion sur l’outil. La seconde partie présentera le MSR-T, la méthodologie employée, les résultats obtenus et une discussion sur l’outil. Finalement, l’articulation des outils sera discutée en vue de comprendre comment les outils peuvent être utilisés à l’avenir.

Le SRLIS

Le SRLIS, développé par Zimmerman et Pons en 1986, est l’un des premiers instruments qui vise à évaluer l’apprentissage autorégulé des apprenant·e·s. L’outil est un protocole d’entretien court et directif. L’entretien propose six contextes authentiques d’apprentissage différents dans lesquels l’étudiant·e interogé·e est invité·e à se plonger l’un après l’autre. Pour chaque contexte, l’étudiant·e est invité à décrire les actions qu’il ou elle entreprendrait. Les chercheurs ont défini 14 stratégies d’autorégulation[1] de l’apprentissage dans lesquels ils classent les réponses des étudiant·e·s interrogé·e·s. Les réponses étaient finalement catégorisées selon trois procédures différentes. 

La première procédure note de manière dichotomique selon qu’une stratégie est apparue dans l’un des contextes d’apprentissage, elle porte le nom d’utilisation de la stratégie (SU). La seconde mesure relate le nombre de fois qu’une stratégie a été mentionnée, cette mesure est nommée « fréquence de la stratégie » (SF). Cette mesure n’a pas été utilisée dans l’étude de Zimmerman et Pons (1986), car aucun·e des sujets n’avait mentionné utiliser plus d’une fois une stratégie. Enfin, la dernière mesure relate l’estimation par l’étudiant·e interrogé·e de la fréquence d’utilisation de chaque stratégie mentionnée. Les chercheurs nomment cette stratégie la « cohérence de la stratégie » (SC). La fréquence de l’utilisation des stratégies est pondérée selon une échelle de Lickert allant de 1 : rarement à 4 : la plupart du temps.

Grâce à cette recherche, Zimmerman et Pons (1986) ont pu tester l’hypothèse que les élèves plus performants sont ceux qui font un meilleur usage des stratégies d’autorégulation des apprentissages repose sur un consensus littéraire rapporté par les chercheurs affirmant que : 

« La réussite scolaire est un domaine dans lequel les processus d’apprentissage autorégulés sont présumés essentiels » (traduction personnelle ; Zimmerman et Pons, 1986) p.615

De plus, les résultats du SRLIS permettent à l’intervieweur·se de décrire les stratégies d’autorégulation des apprentissages utilisées en contextes naturels de l’apprenant·e interrogé·e. Cette description permet par la suite d’identifier les points forts et faibles de l’apprenant·e. Ces derniers pourront être travaillés afin de permettre à l’apprenant·e d’améliorer ses performances académiques. 

Au terme de leur étude, les chercheurs ont mesuré une forte corrélation entre l’utilisation des stratégies d’autorégulation des apprentissages et la réussite scolaire des étudiant·e·s. 

Méthodologie

Pour passer les deux outils, le SRLIS et le MSR-T, un échantillon de convenance a été formé. Seulement, pour que les sujets puissent répondre au questionnaire MSR-T il a fallu choisir des personnes qui sont diplômées de la Haute École Pédagogique de Fribourg. Ainsi, j’ai interrogé deux étudiantes en première année de master de la faculté des sciences de l’éducation qui ont le bachelor HEP en enseignement primaire. L’une d’elles possède également un master en enseignement spécialisé et exerce à ce jour. Une des participantes a 23 ans et l’autre a 32 ans. Les deux participantes ont été informées de l’anonymisation des données et elles ont donné leur consentement pour que j’enregistre les entretiens.

Les entretiens ont été menés de la même manière que pour l’étude de Zimmerman et Pons (1986). Lorsqu’une stratégie était mentionnée, je demandais à l’étudiante de préciser la fréquence d’utilisation. Pour obtenir le plus d’informations sur l’utilisation des stratégies, après que l’étudiante avait exprimé toutes les stratégies auxquelles elle pensait, je l’ai relancée en lui demandant de s’imaginer qu’elle serait en difficulté. 

Pour compiler les résultats obtenus, les verbatims des entretiens ont été classés selon les 15 catégories de stratégies d’autorégulation des apprentissages proposées dans l’étude de Zimmerman et Pons (1986). Enfin, les données ont été ensuite compilées selon les trois procédures décrites dans la recherche : SU, SC et SF. La fréquence de la stratégie (SF), cette procédure a été applicable dans ces entretiens puisque les participantes ont mentionné plusieurs manières d’utiliser une stratégie. Ainsi, une personne mentionne qu’elle prend des notes et note ses questions dans un classeur à part. Ces deux actions seront comptées comme deux occurrences de la stratégie « 5. Tenue de registre et suivi ». 

Tableau 1

Résultats des participantes 1 et 2 selon les 3 procédures d’analyse (SU, SF,SC)

Résultats de la participante 1

La première participante que j’ai interrogée (P1) a mentionné toutes les stratégies, elle a même ajouté une stratégie supplémentaire en lien avec les délais imposés. La stratégie qu’elle utilise le plus, tous contextes confondus, est la définition d’objectifs et la planification (4/6). La moyenne de la régularité de cette stratégie estimée par l’étudiante est également élevée, plus de trois. Les deux autres stratégies les plus mentionnées lors de l’entretien sont l’autoévaluation et l’organisation et la transformation. Ces stratégies ont été mentionnées dans trois des six contextes proposés avec une pondération de 2,5 pour l’autoévaluation et de 3 pour l’organisation et la transformation. De plus, les autres stratégies, mentionnées une à deux fois durant l’entretien, portent une pondération allant de 2 à 4. La participante 1 n’a jamais attribué la pondération minimale, mais a attribué plusieurs fois la pondération maximale.

Enfin, l’entretien avec la participante 1 a révélé que cette dernière met en place plus de cinq manières différentes de tenir un registre des cours dans un même contexte. Elle diversifie également beaucoup ses façons de définir des objectifs et de planifier. En effet, pour un même contexte, l’étudiante a mentionné jusqu’à quatre manières différentes d’exploiter cette stratégie.

Résultats de la participante 2

La seconde participante que j’ai interrogée (P2) n’a quant à elle pas mentionné toutes les stratégies durant l’entretien. Elle a mentionné que sept des onze stratégies. On constate cependant que cette participante utilise le plus la stratégie « définition d’objectifs et planification » (5/6). Les autres stratégies les plus mentionnées par la participante 2 sont la tenue d’un registre et l’examen des dossiers (4/6). Les deux stratégies qui ont le moins été mentionnées sont les conséquences personnelles et la répétition et la mémorisation (1/6). Il est intéressant de noter que la participante 2 évalue cependant la fréquence d’utilisation de ces stratégies les moins mentionnées à 2,99 en moyenne, ce qui correspond tout de même à une utilisation fréquente. Enfin, la participante 2 présente au maximum trois actions différentes mises en place pour une stratégie et deux actions différentes pour deux autres stratégies.

En conclusion, les résultats obtenus montrent que les deux étudiantes présentent des caractéristiques de profils d’apprentissage similaires en certains points comme les stratégies les plus utilisées et très différentes dans d’autres comme les nombres de stratégies mentionnées durant l’entretien. 

Discussion sur l’outil de mesure

Les entretiens réalisés avec le SRLIS permettent de dresser un portrait détaillé des stratégies d’apprentissages autorégulés mises en œuvre par les deux participantes dans des contextes académiques. Le SRLIS, bien qu’il bénéficie d’une validité convergente et discriminante démontrée dans l’étude de Zimmerman et Pons (1986), présente quelques limites dans sa fiabilité, dans les entretiens réalisés. Par exemple, le cas de la participante 2 qui mentionne une stratégie qu’une seule fois après avoir été relancée, mais qui évalue la fréquence d’utilisation de cette stratégie comme étant élevée. Ceci soulève donc des questions sur la cohérence entre les déclarations des interrogé·e·s et les comportements réels. 

Or le SRLIS reste utile et intéressant pour guider les entretiens grâce à sa structure précise et afin d’identifier les forces et les faiblesses des interrogé·e·s. L’outil permet aussi de recueillir des réponses variées grâce aux scénarios qui favorisent la projection. Toutefois, d’autres points peuvent nuancer sa validité et sa fiabilité. Par exemple, la catégorisation des réponses reste complexe, certains verbatims pourraient être associés à plusieurs catégories. Cela met donc en exergue une fragilité dans le système de codage, accentuée par l’absence d’accord interjuges dans ce contexte, qui aurait permis de sécuriser les catégorisations.

D’autre part, les scénarios issus de l’étude originale (Zimmerman et Pons, 1986) ne correspondent pas toujours aux réalités des participantes. Cette inadéquation a conduit à des incompréhensions. Par ailleurs, il est aussi possible que les participantes aient omis des stratégies pourtant fréquemment utilisées, ce qui affecte également la fiabilité des données recueillies.

Malgré ces limites, le SRLIS reste un outil pertinent pour évaluer l’apprentissage autorégulé. Il offre une vision globale des pratiques des apprenant·e·s tout en mettant en lumière la nécessité d’améliorer son adaptation, notamment pour des étudiant·e·s de niveau tertiaire, et de renforcer ses modalités de codage et de catégorisation pour garantir des résultats plus robustes et exploitables.

Le MSR-T

Le MSR-T est un outil développé par Li Sanchez et Schwinger en 2023, visant à mesurer les capacités d’autorégulation des enseignant·e·s par un questionnaire de 27 items reposés dans différents 4 contextes[2]. Les items portent sur 3 dimensions, la planification, le monitoring et la réflexion. Ces dimensions font écho au cycle de l’autorégulation d’Usher et Schunk (2017) avec la phase d’anticipation, de réalisation et de réflexion.

Les 27 items sont divisés en trois parties. Chaque partie contient donc 18 items et porte sur une des dimensions évaluées. Parmi ces 18 items, neuf sont considérés comme étant des stratégies adaptatives (SA), donc bénéfiques à la réalisation de l’apprentissage et neuf sont considérés comme des stratégies non adaptatives (SNA) et néfastes à l’apprentissage. Chaque item est évalué par une échelle de Lickert allant de 1 (presque jamais) à 5 (presque toujours). Il est demandé à l’interrogé·e d’attribuer une note en fonction de la fréquence avec laquelle il ou elle adopte les pensées ou comportements décris dans les items dans le but d’adapter consciemment leur comportement en fonction d’un objectif spécifique. Une moyenne élevée en SA traduit une autorégulation de l’apprentissage performante et une moyenne élevée en SNA correspondrait à une autorégulation de l’apprentissage moins bonne. Un profil d’un individu performant est donc un profil qui note les SA avec un haut degré de l’échelle de Lickert, et qui note faiblement les SNA.

Méthodologie

Pour ce travail, 2 contextes sur les 4 ont été choisis : le contexte d’enseignement, car c’est la composante essentielle du rôle d’enseignant·e et le contexte d’automotivation qui est une composante essentielle de l’autorégulation ainsi que fondamentale dans le domaine de l’apprentissage (Berger et Büchel, 2012). Le contexte d’automotivation permet aussi de faire le lien avec un des contextes du SRLIS portant également sur l’automotivation. Les items ont ensuite été traduits et randomisés puis mis en forme de questionnaire. L’échantillon reste le même que pour la passation du SRLIS. Les participantes ont rempli le questionnaire à distance. Pour analyser les résultats, la moyenne, des stratégies adaptatives et non adaptatives ont été effectuées pour chaque dimension.

Résultats participante 1

Tableau 2 : P1 , contexte d’enseignement

La participante 1 à des moyennes de SA supérieure à la moyenne (3). L’écart entre les SA et les SNA est supérieur à 1 point pour toutes les dimensions. Cependant, il pourrait être intéressant d’optimiser les dimensions de planification et de réflexion qui sont les moyennes des dimensions où les SNA sont les plus élevés.

Tableau 3 : P1 , contexte d’automotivation

Les moyennes de SA de la participante 1 sont toutes à .6 au-dessus de la moyenne. Toutes les moyennes des SA sont identiques au contexte d’enseignement sauf la planification qui perd .2 point. Cependant, en planification, la moyenne des SNA baisse de .25 et la moyenne des SNA en réflexion augmente de .25.

Ainsi, il se pourrait que la participante 1 éprouve quelques difficultés supplémentaires en contexte d’automotivation et notamment dans la dimension de réflexion.

Résultats participante 2

Tableau 4 : P2 , contexte d’enseignement

Les résultats de la participante 2 sont plus atypiques. On constate un faible écart entre les moyennes de SA et SNA en planification et en réflexion. Ces deux domaines pourraient bénéficier d’une attention particulière afin d’essayer de les améliorer. Aussi, bien que les SA de la dimension de monitoring soient en dessus de la moyenne, elles ne le sont que de .4 alors que les SNA sont en dessous de la moyenne de seulement .25. Ceci pourrait traduire des difficultés qu’aurait la participante dans l’enseignement. 

Tableau 5 : P2 , contexte d’automotivation

Dans le contexte d’automotivation, la participante 2 semble également éprouver des difficultés, selon les résultats que rapporte le MSR-T. En effet, les moyennes des SNA dans les contextes de monitoring et de réflexion sont supérieures à la moyenne ainsi qu’à la moyenne des SA. Pour la participante 2, une optimisation des stratégies d’autorégulation serait souhaitable dans le contexte d’enseignement dans les dimensions de planification et de réflexion et dans le contexte d’automotivation, dans les dimensions de monitoring et de réflexion.

Au travers des résultats des participantes, on constate que le contexte d’enseignement est le contexte dans lequel les participantes semblent avoir le moins de difficultés. Ceci pourrait être dû à la réalité du métier dans lequel de bonnes capacités d’autorégulation de l’apprentissage sont essentielles. Il est aussi possible que la formation à l’enseignement étant plus axée sur ce domaine que sur le domaine de l’automotivation impacte les résultats.

Discussion sur l’outil

Le MSR-T est un outil intéressant pour explorer les pratiques d’autorégulation des enseignant·e·s, mais il présente des forces et des limites. En matière de validité, l’outil teste effectivement ce qu’il est censé mesurer, comme le montrent les analyses factorielles validant sa structure en trois dimensions. La validité convergente est également démontrée par des corrélations significatives avec d’autres échelles, telles que celles évaluant la motivation ou le sentiment d’efficacité personnel. Il est également important de noter le possible effet Dunning-Kruger (1999) dans les réponses données par les participantes. En effet, il peut être difficile d’estimer ses propres connaissances et ses propres comportements. 

Cependant, l’échelle finale, composée de 27 items, n’a pas encore été testée par Li Sanchez et Schwinger (2023), ce qui limite la généralisation des résultats. De plus, les résultats révèlent une difficulté à distinguer les contextes dans lesquels les enseignant·e·s évoluent. Par exemple, les scores de la participante 1 étaient très similaires entre des affirmations censées refléter des contextes différents, soulevant des interrogations sur la prise en compte du contexte lors des réponses. Cela pourrait s’expliquer par la nature personnelle des items, davantage liés au fonctionnement intrinsèque qu’au cadre spécifique, ou par une difficulté à maintenir une différenciation contextuelle tout au long du questionnaire.Sur le plan de la fidélité, les résultats du MSR-T dans l’étude de Li Sanchez et Schwinger (2023) montrent une cohérence interne (α = 0.715 à 0.923) et une stabilité satisfaisantes. Cependant, la réduction des items dans sa version définitive semble avoir impacté cette stabilité, nécessitant une exploration plus approfondie. Malgré ces limites, mon expérience personnelle avec cet outil confirme son utilité pour aborder l’autorégulation des enseignant·e·s, il également intéressant que le MSR-T propose une distinction entre les SA et les SNA.

SRLIS et MSRT

L’utilisation conjointe du SRLIS et du MSR-T sur l’échantillon a permis d’établir certains parallèles entre les résultats, tout en ouvrant des pistes de réflexion sur les incohérences observées. Tout d’abord, il est important de noter que ces deux outils évaluent des statuts distincts : le SRLIS se concentre sur le statut d’étudiant·e, tandis que le MSR-T s’adresse à des professionnel·le·s. Malgré cette différence, les deux outils offrent une mise en contexte pertinente aux répondant·e·s, favorisant une réflexion ciblée sur leurs pratiques.

L’entretien proposé par le SRLIS permet de recueillir les impressions des participant·e·s en temps réel, offrant ainsi un aperçu détaillé de leurs stratégies, bien que certaines puissent être omises par oubli. Cet outil fournit néanmoins une vue d’ensemble riche et nuancée du fonctionnement de l’individu. De son côté, le MSR-T invite les répondant·e·s à s’identifier à des réflexions proposées et intègre des stratégies non adaptatives (SNA), ce qui offre une perspective plus approfondie sur les difficultés rencontrées. Aussi, il est essentiel de comprendre quels sont les mécanismes de compréhension des enseignant·e·s afin d’identifier les difficultés rencontrées avant qu’elles ne s’installent dans leur pratique professionnelle (Berger et Cartier, 2023).

Pour répondre à la question initiale, il apparaît pertinent d’envisager une utilisation complémentaire des deux outils. Cela nécessiterait toutefois une adaptation des scénarios et des contextes pour qu’ils puissent être appliqués à un même public. Une telle complémentarité offrirait une vision plus complète et holistique de l’autorégulation de l’apprentissage chez un individu, permettant ainsi de proposer des interventions plus adaptées et personnalisées. Cependant, en l’absence d’études approfondies sur les adaptations nécessaires et l’utilisation combinée de ces outils, les résultats doivent être interprétés avec prudence. Ils constituent des pistes à explorer davantage, mais ne peuvent prétendre à une généralisation.

Références

  • Berger, J.-L. et Büchel, F. (2012). Métacognition et croyances motivationnelles : un mariage de raison. Revue française de pédagogie, (179), 95‑128. https://doi.org/10.4000/rfp.3705
  • Berger, J.-L. et Cartier, S. C. (2023). Chapitre 1. De l’importance de se mettre d’accord sur le plan terminologique. Dans L’apprentissage autorégulé (p. 23‑34). De Boeck Supérieur. https://doi.org/10.3917/dbu.sylvi.2023.01.0023
  • Berger, J.-L., Kipfer, N. et Büchel, F. P. (2013). Des effets d’un entraînement métacognitif sur les stratégies et les performances en compréhension de texte chez des adolescents présentant de sévères difficultés d’apprentissage. Nouveaux cahiers de la recherche en éducation15(2), 119‑146. https://doi.org/10.7202/1018459ar
  • Boekaerts, M. (1997). Self-regulated learning: A new concept embraced by researchers, policy makers, educators, teachers, and students. Learning and Instruction7(2), 161‑186. https://doi.org/10.1016/S0959-4752(96)00015-1
  • Flavell, J. H. (1979). Metacognition and cognitive monitoring: A new area of cognitive–developmental inquiry. American Psychologist34(10), 906‑911. https://doi.org/10.1037/0003-066X.34.10.906
  • Kruger, J. et Dunning, D. (1999). Unskilled and unaware of it: How difficulties in recognizing one’s own incompetence lead to inflated self-assessments. Journal of Personality and Social Psychology77(6), 1121‑1134. https://doi.org/10.1037/0022-3514.77.6.1121
  • Li Sanchez, K. et Schwinger, M. (2023). Development and Validation of the Marburg Self-Regulation Questionnaire for Teachers (MSR-T). Trends in Higher Education2(3), 434‑461. https://doi.org/10.3390/higheredu2030026
  • Mevarech, Z. et Kramarski, B. (2014). Critical maths for innovative societies: the role of metacognitive pedagogies. OECD.
  • Noonan, A. (2022). Self-regulation in Education by Jeffrey A. Greene. Journal of Contemporary Issues in Education17(1). https://doi.org/10.20355/jcie29510
  • Schunk, D. H. et Greene, J. A. (2018). Historical, contemporary, and future perspectives on self-regulated learning and performance. Dans Handbook of self-regulation of learning and performance, 2nd ed. (p. 1‑15). Routledge/Taylor & Francis Group. https://doi.org/10.4324/9781315697048-1
  • Usher, E. L. et Schunk, D. H. (2018). Social Cognitive Theoretical Perspective of Self-Regulation. Dans Handbook of Self-Regulation of Learning and Performance (2e éd.). Routledge.
  • Zimmerman, B. J. et Pons, M. M. (1986). Development of a Structured Interview for Assessing Student Use of Self-Regulated Learning Strategies. American Educational Research Journal23(4), 614‑628. https://doi.org/10.3102/00028312023004614

[1]Auto-évaluation, organisation et transformation, fixation d’objectifs et planification, recherche d’information, tenue de registre et suivi, structuration de l’environnement, conséquences personnelles, répétition et mémorisation, recherche d’aide sociale (pairs, parents, enseignant·e), examen des dossiers (notes, lectures, évaluations)

[2]  l’enseignement (gestion des cours, des objectifs pédagogiques et des imprévus), l’auto-motivation (gestion du bien-être personnel et professionnel pour éviter l’épuisement), le self-care (maintien d’un niveau de motivation élevé face aux défis du métier), la communication (interactions avec les collègues, les parents et les élèves)