Auteure: Patricia Santos Victor

Introduction

L’apprentissage autorégulé est un domaine d’étude important des sciences de l’éducation depuis les années 70. Depuis l’émergence des différentes théories sur l’apprentissage autorégulé, les étudiants sont considérés comme des participants pleinement actifs de façon métacognitive, comportementale et motivationnelle dans leur processus d’apprentissage (Zimmerman & Martinez-Pons, 1988). C’est dans cette perspective que divers outils ont été conceptualisés et développés pour évaluer et mesurer les compétences d’apprentissage autorégulé de la population (Frenkel, 2014) : tests, questionnaires, entretiens, programmes informatiques, observations, etc. C’est ainsi que des outils tels que le SRLIS (Zimmerman & Martinez-Pons, 1968) et plus récemment le SKT-SRL (Dörrenbächer-Ulrich, Sparfeldt, Perels, 2024) ont vu le jour. Dans le cadre de cette petite étude, nous comparerons ces deux instruments, à savoir le Self-Regulated Learning Interview Schedule (SRLIS) et le Strategy knowledge test for Self-Regulated learning (SKT-SRL).

Avant de poursuivre dans la comparaison, il semble nécessaire de s’arrêter sur la notion « d’apprentissage autorégulé » que nous aborderons sous l’angle du chercheur Barry Zimmerman. En effet, compte tenu des outils étudiés, il s’agit du choix le plus pertinent, bien qu’il existe de nombreuses définitions et théorisations de l’apprentissage autorégulé.
L’apprentissage autorégulé se définit par les « processes whereby learners personally activate and sustain cognitions, affects, and behaviours that are systematically oriented towards the attainment of personal goals » (Zimmerman, 2011, p. 1). Il s’agit donc d’un mouvement d’autorégulation par lequel les étudiant·e·s adaptent leurs capacités mentales en compétences académiques (Zimmerman, 2002a). De ce fait, l’apprentissage est une activité proactive qu’il est possible d’améliorer. C’est notamment en vue d’un perfectionnement des compétences d’apprentissage autorégulé que les tests SRLIS et SKT-SRL ont été créés. Leur but est d’identifier les lacunes des étudiant·e·s afin de mettre en place une intervention pédagogique ciblée qui permette, à termes, d’améliorer leurs performances scolaires. L’apprentissage autorégulé, pour être efficace, ne nécessite pas seulement la connaissance de compétences ou de techniques ; il nécessite aussi une conscience de soi, de la motivation et des compétences comportementales afin que cette connaissance puisse être appliquée de manière appropriée (Zimmerman, 2002a).
Il existe trois phases d’autorégulation : l’anticipation, l’action et l’autoréflexion. Ces phases sont cycliques, car il s’agit d’un processus autorégulateur continuellement en développement (Zimmerman, 2002b). L’anticipation est une phase précédant l’apprentissage, elle comporte deux processus principaux : l’analyse de la tâche (planification stratégique, fixation d’objectifs) et les croyances d’auto-motivation (résultats attendus, auto-efficacité). L’action est la phase concomitante à l’apprentissage, elle permet de moduler l’activité et l’attention. Ses deux principaux processus étant : l’usage de stratégies (focalisation de l’attention, imagerie mentale) et l’auto-observation (suivi autonome des performances, auto-expérimentation). La dernière phase du cycle, l’autoréflexion, succède à l’apprentissage et influence à son tour le processus d’anticipation ultérieur. Ses principaux processus sont : les auto-jugements (auto-évaluation, attribution causale) et l’auto-réaction (autosatisfaction, stratégies adaptatives) (Zimmerman, 2002b).
Tout apprentissage autorégulé englobe des stratégies d’apprentissage cognitives, métacognitives et motivationnelles (aussi appelées psychoaffectives) (Frenkel, 2014). Il s’agit de méthodes spécifiques, reposant sur des connaissances procédurales, utilisées pour accomplir une tâche et pouvant intervenir au cours des trois phases d’autorégulation.

1. Le SRLIS

1.1. Description de l’outil

Le SRLIS est un outil d’évaluation créé par Zimmerman et Martinez-Pons en 1986. Il s’agit de l’un des premiers instruments visant à évaluer les stratégies d’apprentissage autorégulé des apprenant·e·s par une interview courte et structurée comportant des questions se développant sur six scénarios. Cet outil se développe sous un format d’entretien directif à réponses libres qui sont alors analysées et codées pour en retirer les différentes stratégies d’apprentissage utilisées par les participant·e·s. L’outil d’analyse des réponses du SRLIS propose au total quatorze stratégies d’autorégulation créées sur la base de précédentes théories mentionnées dans l’étude de Zimmerman et Martinez-Pons (1986). Ces catégories sont : l’auto-évaluation, l’organisation et la transformation, la fixation d’objectifs et la planification, la recherche d’informations, la tenue de registres et suivi, la structuration de l’environnement, les conséquences personnelles, la répétions et la mémorisation, la recherche d’aide sociale et l’examen des dossiers. Finalement, une quinzième catégorie intitulée « autres » a été ajoutée pour les déclarations évoquant un comportement d’apprentissage initié par un acteur externe, tel qu’un professeur par exemple.

1.2. Échantillon et méthodologie

L’échantillon de cette étude est un échantillon de convenance constitué à partir du réseau amical. Le seul critère de sélection était que les participant·e·s sélectionné·e·s devaient être deux étudiant·e·s inscrit·e·s dans le milieu académique. L’échantillon de cette présente étude est composé de deux étudiant·e·s en Master de l’université de Fribourg. Notre premier·ère participant·e (que nous nommerons P1) est une femme de vingt-six ans, étudiante de Master en psychologie clinique et de la santé. Notre second·e participant·e (nommée P2) est une femme de vingt-sept ans, étudiante de Master de DAES I dans les branches histoire, anglais et français langue étrangère.

Pour convenir à la présente étude, les six scénarios ont été adaptés et traduits pour correspondre à des élèves académiques francophones, car le SRLIS a été pensé pour des élèves issus du secondaire. Les participant·e·s ont été averti·e·s quant à la tenue de l’étude ainsi qu’à la garantie de leur anonymat. Après l’obtention du consentement des étudiant·e·s interrogé·e·s, les interviews d’une dizaine de minutes ont été réalisées par visioconférence. Celles-ci ont été enregistrées et retranscrites (cf. annexe). Par la suite, les réponses ont été analysées et les diverses stratégies mentionnées par les participant·e·s ont été identifiées et classées par nos soins dans les quinze différentes catégories d’analyse du SRLIS.

1.3. Présentation des résultats

Le premier tableau répertorie toutes les techniques évoquées par participant·e et par scénario dans l’ordre dans lequel elles ont été mentionnées.


Ce tableau indique que, comparativement à P2, P1 mentionne de manière générale plus de techniques pour chaque scénario. Il semblerait également que les stratégies que P1 met en œuvre soient plus transversales, car plusieurs techniques se retrouvent dans différents scénarios. C’est notamment le cas pour les techniques 2 et 9 qui sont très récurrentes chez P1. P2 ne fait pas preuve d’une telle récurrence dans l’utilisation des stratégies.
Les troisième et sixième scénarios se distinguent nettement par leur taux de réponse chez les deux participant·e·s sensiblement plus faible, voire nul. En effet, malgré des relances, P2 n’a fourni aucune réponse au troisième scénario.

Le deuxième tableau recense le nombre total de techniques utilisées et leur occurrence en faisant abstraction des différents scénarios. Les première et deuxième colonnes répertorient de façon numérale et dichotomique l’utilisation ou non d’une technique : Le « 1 » signifiant que la technique a été mentionnée durant l’entretien et le « 0 » signifiant que la technique n’a été mentionnée dans aucun scénario. De ce fait, le score maximal de techniques utilisées est de quinze (Zimmerman & Martinez-Pons, 1986). Les troisième et quatrième colonnes répertorient le nombre d’occurrences des diverses techniques parmi les différents scénarios.

Dans ce second tableau, les deux premières colonnes démontrent que les deux participant·e·s mettent en œuvre le même nombre de techniques. Toutefois, comme le premier tableau le suggérait déjà : P1 utilise quantitativement un plus grand nombre de techniques que P2. Ce second tableau ne fait que confirmer statistiquement les observations faites dans le premier tableau : il existe une nette différence entre P1 et P2 concernant l’utilisation répétée et transversale des stratégies d’apprentissage autorégulé. P1 démontre une capacité d’adaptation des différentes techniques d’apprentissage autorégulé en fonction des contextes variés.
Par ailleurs, ce tableau souligne également que les techniques 10, 11 et 12 sont totalement négligées par les deux participant·e·s, quel que soit le scénario.

1.4. Discussion

Dans le premier tableau, nous avons constaté que certaines questions ont bénéficié de réponses bien plus concises que d’autres. Cette différence de résultats entre les différents scénarios souligne le besoin de développer l’outil SRLIS afin qu’il puisse mieux s’accorder à la réalité universitaire. En effet, si nous prenons le troisième scénario par exemple, les devoirs ne font plus vraiment partie de l’enseignement académique et la présence ou non de devoirs dépend aussi grandement des matières choisies par les étudiants. Inversement, le scénario se rapportant aux examens a bénéficié du taux de réponse le plus haut, car il s’agit d’un élément central du cursus universitaire. Par ailleurs, l’absence des scénarios 10, 11, 12 relève aussi de l’incompatibilité du SRLIS à une population académique. Effectivement, le milieu académique ne permet pas une relation professeur-élève aussi profonde qu’au degré secondaire, la onzième technique est plutôt rare en milieu universitaire et la douzième technique dépend énormément des branches choisies – les branches scientifiques permettant bien plus l’accès aux anciens examens que les branches non scientifiques.
Comme il est démontré dans le deuxième tableau, les deux participant·e·s font preuve d’un taux plutôt élevé de techniques différentes, chacun·e utilise neuf techniques d’apprentissage autorégulé sur les quatorze possibles – en retirant donc la catégorie « autres » qui ne relève pas d’une technique d’apprentissage autorégulé. Pourtant, le nombre total de stratégies énoncées lors des interviews est très différent d’un·e participant·e à l’autre, le taux de réponse de P1 surpasse de presque un tiers celui de P2. Cette grande différence souligne encore une fois les limites de l’outil SRLIS dans le cadre universitaire. Puisque les sujets sont des étudiant·e·s arrivé·e·s à la fin de leur cursus universitaire, il n’est pas étonnant de constater qu’une grande variété de techniques soit mise en pratique. Effectivement, étant donné leur niveau d’études, il est tout à fait normal que nos participant·e·s soient compétent·e·s dans la maîtrise de techniques et stratégies d’autorégulation. Il serait plus intéressant, dans le cadre universitaire, d’approfondir les techniques pour permettre une stratification supplémentaire afin de différencier les apprenant·e·s de haut niveau et les apprenant·e·s connaissant les bases de l’apprentissage autorégulé.
Finalement, cet instrument présente un grand intérêt, car il permet d’obtenir la mise en pratique en contexte des techniques d’apprentissage autorégulé. Dans le cadre de notre étude, il a permis de souligner une différence dans l’utilisation des techniques d’apprentissage autorégulé entre deux étudiant·e·s en fin de Master. Cela prouve encore une fois que l’apprentissage autorégulé peut toujours être amélioré, quels que soient le degré d’études et le perfectionnement. Ce type d’observation pourrait être davantage exploré afin de développer une intervention ciblée, adapté à un sujet ou à une population présentant les mêmes lacunes.

2. Le SKT-SRL

2.1. Description de l’outil

Conceptualisé par Dörrenbächer-Ulrich, Sparfeldt et Perels en 2024, le SKT-SRL est un outil d’évaluation des connaissances de stratégies d’apprentissage autorégulé en se détachant totalement de la mise en pratique réelle de ces mêmes stratégies. Les chercheurs se basent lors de sa conception sur les modèles de Boekaerts (1999) et de Zimmerman (2000). Ce test a pour but de diagnostiquer les lacunes en matière de connaissances d’apprentissage autorégulé chez les étudiants de l’enseignement supérieur. En prenant connaissance de ces lacunes, il sera alors possible d’envisager des interventions ciblées. L’outil SKT-SRL se différencie par son approche quantitative et hors-ligne – il s’agit d’un type de méthode qui évalue les compétences plus générales et qui est donc indépendant d’une situation d’apprentissage spécifique.

Cet instrument se traduit sous forme de questionnaire divisé en sept scénarios : il présente un scénario métacognitif et un scénario motivationnel pour chacune des trois phases d’apprentissage que sont l’anticipation, l’action et l’autoréflexion, ainsi qu’un scénario cognitif supplémentaire dans la phase d’action. Les apprenant·e·s doivent évaluer l’utilité de six différentes stratégies face à un scénario donné. Trois de ces stratégies sont considérées comme « efficaces » et trois autres sont considérées comme « moins efficaces ». Cette classification entre les stratégies a été réalisée par un groupe d’expert·e·s afin de garantir la validité des scénarios. Les participant·e·s doivent juger de l’efficacité d’une stratégie à l’aide d’une échelle de Likert allant de « 1 : pas du tout efficace » à « 4 : très efficace ». Les réponses des participant·e·s sont ensuite comparées à la moyenne des évaluations attribuées par les expert·e·s. Plus la réponse de l’apprenant·e est proche de celle des expert·e·s et plus son nombre de points augmente. Ainsi, les résultats de cet instrument sont quantifiés, permettant ainsi une évaluation objective et précise des connaissances des participant·e·s.

2.2. Échantillon et méthodologie

Pour ce deuxième outil, l’échantillon reste identique, soit P1 et P2. Après avoir une nouvelle fois obtenu leur consentement, les avoir informé·e·s sur la tenue de l’étude et leur avoir garanti l’anonymat, le questionnaire du SKT-SRL leur a été envoyé par courriel immédiatement après l’entretien du SRLIS. Le questionnaire a été rempli tout en maintenant la visioconférence ouverte afin de pouvoir répondre à d’éventuelles questions. La passation de cet outil a été réalisée en moins de dix minutes et le questionnaire dûment rempli a été retourné de suite par courriel.

2.3. Présentation des résultats

Le tableau suivant représente les résultats obtenus par P1 et P2 au test SKT-SRL, ces résultats ont été obtenus suite à un calcul créé par les auteurs de l’outil (Dörrenbächer-Ulrich et al., 2024) dont les détails ne seront pas exposés dans la présente étude. Soit 18 étant le score maximal pour un scénario, cela signifie que l’estimation de l’utilité des techniques issues de ce scénario est conforme à l’évaluation des experts. En réunissant les sept scénarios, le maximum de points est alors 126.

Globalement, les résultats entre P1 et P2 sont plutôt hétérogènes d’un scénario à l’autre. Par son score élevé, P1 démontre une bonne connaissance des stratégies d’apprentissage autorégulé tandis que P2 éprouve quelques difficultés dans la reconnaissance de l’efficacité ou non des stratégies d’apprentissage puisque son score ne dépasse que de très peu la moyenne.
En étudiant les scores par scénario, il est possible de déterminer que les points forts de P1 se situent dans les scénarios 4 et 5 relatifs à la phase d’action, tandis que ses points faibles apparaissent dans les scénarios 1 et 6, qui concernent le plan motivationnel. P2 affiche également une bonne performance dans le scénario 4, ses scores aux scénarios 3 et 5 sont aussi plutôt bons. Ainsi, ses meilleures performances se trouvent dans la phase d’action. En revanche, ses points faibles sont soulignés par les scénarios 1, 2, 6 et 7, ce qui suggère que P2 rencontre des difficultés à identifier les stratégies d’apprentissage efficaces dans les phases d’anticipation et d’autoréflexion. En conclusion, les résultats obtenus indiquent une meilleure aptitude de la phase d’action pour les deux participant·e·s.

2.4. Discussion

La segmentation des scénarios par phase et par technique permet d’observer chaque catégorie attentivement et d’identifier des patrons de performance. Ainsi, P1 semble avoir une capacité plus uniforme bien que certaines lacunes subsistent. À l’inverse, P2 démontre une performance plus polarisée, avec des forces marquées, mais aussi des faiblesses prononcées. Toutefois, malgré un patron de performances différent, les deux participant·e·s se retrouvent dans leurs points forts et leurs points faibles à savoir une évaluation relativement bonne dans la phase d’action et un jugement plus perfectible dans les phases d’anticipation et d’auto-évaluation. Le sixième scénario se rapportant aux techniques motivationnelles dans la phase d’autoréflexion est notamment le scénario qui a posé le plus de difficultés à nos sujets. Il serait pertinent de l’analyser afin de comprendre les raisons de cette difficulté, mais cet approfondissement ne sera pas possible dans le cadre de cette étude.
Cet outil est très intéressant à utiliser, car les résultats obtenus sont clairs et ne portent pas à l’interprétation. Il permet une évaluation rapide et objective de la connaissance des stratégies d’apprentissage autorégulé. Malgré tout, il est difficile pour un·e chercheur·euse de se satisfaire uniquement de ces résultats, car ils ne permettent pas d’en déduire davantage concernant l’apprentissage autorégulé. De plus, le SKT-SRL se limite à évaluer la connaissance des techniques d’apprentissage autorégulées et non de leur mise en pratique réelle. Par conséquent, est difficile d’élaborer une intervention pédagogique ciblée en ne se basant que sur cet outil.

3. Comparaison SRLIS et SKT-SRL

En matière de résultats, P1 met en pratique plus de stratégies d’apprentissage autorégulé dans le SRLIS et a également le meilleur résultat au test de connaissance des stratégies d’apprentissage autorégulé du SKT-SRL. Une étude plus approfondie et un échantillon plus conséquent pourraient éventuellement établir une corrélation entre la connaissance des stratégies d’apprentissage autorégulé et leur mise en pratique.

En termes de contenu, les deux outils ont leurs avantages et leurs inconvénients :
Le SRLIS permet une évaluation contextualisée, car les participant·e·s évoquent des situations concrètes d’apprentissage. Cet atout permet alors de concevoir une intervention pédagogique ciblée et concrète pour améliorer les compétences d’apprentissage autorégulé. En revanche, ce même avantage qualitatif nuit à la fiabilité du test notamment en ce qui concerne la subjectivité du choix des techniques puisqu’aucun accord interjuges n’a pu être effectué dans le cadre de cette petite étude.
Inversement, le SKT-SRL ne comporte pas de problème de fidélité, car il a pour avantage de cibler des connaissances spécifiques ce qui permet d’aboutir à des résultats objectifs qui offrent une vision quantitative des connaissances de l’apprenant·e. Cependant, l’utilisation seule du SKT-SRL ne peut aboutir à une intervention ciblée puisque le test reste en surface et qu’il se base uniquement sur la connaissance des techniques d’apprentissage autorégulées et non sur leur mise en pratique en contexte.
Les deux instruments soulèvent des problèmes de validité : Le SRLIS n’a pas été créé dans le but de tester la population académique par conséquent, les scénarios et les techniques n’étaient pas adaptés à cette étude. Dans le SKT-SRL, les sujets peuvent être influencés par un biais de désirabilité sociale, les incitant à donner les réponses alignées aux choix des experts.

Par conséquent, le SRLIS est un outil qualitatif tandis que le SKT-SRL est un outil quantitatif. Le SRLIS permet d’étudier en profondeur et de façon contextualisée les stratégies utilisées tandis que le SKT-SRL fournit des mesures standardisées et objectives sur la connaissance des stratégies et non leur utilisation. Ces deux outils se complètent et sont intéressants à utiliser conjointement. Le SKT-SRL permet de savoir si l’apprenant·e connait les différentes stratégies d’apprentissage autorégulé tandis que le SRLIS permet de connaitre quantitativement quelles stratégies sont réellement mises en place ou non.

Conclusion

Le SRLIS et le SKT-SRL sont des outils efficaces, mais ils pourraient bénéficier de révisions pour être optimisés. Le SRLIS pourrait être amélioré pour convenir à des étudiants de cycles supérieurs et le SKT-SRL, étant très récent, mériterait davantage d’études pour le perfectionner. Toutefois, malgré ces inconvénients, ce sont deux tests qui se complètent et qui permettent de faire un réel lien entre la connaissance des techniques et leur mise en pratique. Il serait prometteur de tester conjointement ces deux outils, une fois adaptés, sur un échantillon bien plus large permettant ainsi d’obtenir des résultats tangibles. Leur utilisation conjointe offrirait la possibilité de concevoir des interventions pédagogiques plus ciblées, en permettant d’identifier précisément les besoins spécifiques d’intervention.

Suite à cette étude, quelques questionnements subsistent :
Premièrement, il reste impossible de déterminer si les disciplines choisies influencent les résultats des instruments analysés. Compte tenu des différences dans les méthodes d’enseignement d’une matière à l’autre, il serait particulièrement pertinent de mener des études ciblées sur différents groupes issus de la même discipline afin de déterminer si le choix de celle-ci a une influence sur les résultats de nos outils ou plus largement sur l’apprentissage autorégulé.
Deuxièmement, pourquoi les résultats obtenus sont-ils si différents entre nos deux sujets alors qu’il s’agit d’étudiant·e·s en voie de réussite dans leur cursus ? La logique voudrait que les deux sujets aient des résultats très bons et relativement similaires. Il serait intéressant de comparer les résultats de ces tests aux résultats scolaires pour déterminer si l’écart entre les deux sujets se reflète également dans leurs résultats scolaires. Ce nouvel élément justifierait peut-être l’écart entre les deux participant·e·s. En approfondissant la réflexion sur le perfectionnement de l’apprentissage autorégulé, cette observation soulève une question plus large : dans quelle mesure l’apprentissage autorégulé a encore un impact dans le cadre universitaire ?


Bibliographie

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